May Ziade

Ô toi l’étranger ! Translated by Dr. Jamil Jabre 2008

Ô toi l’étranger ! Translated by Dr. Jamil Jabre 2008 
(Requesting the translation Nada Alhaddad for Noé Lugaz)

Avant la première guerre mondiale et après avoir lu les romans et les articles de Gébrane, May fut émerveillée par le souffle si particulier de cet écrivain et sa sensibilité profonde.

Elle lui adressa une lettre où elle se fait connaître. Leur correspondance se poursuit mais avec difficultés vu les inconvénients de la guerre.

A la faveur de la paix, leur correspondance reprit et évolua de l’amitié à l’amour platonique, car May aima Gébrane profondément trouvant en lui l’âme sœur.

Un jour elle lui adressa cet appel pressant :

Toi et moi sommes prisonniers de la vie.

On reconnaît les prisonniers à leurs numéros comme les vivants grâce à leurs noms.
Ainsi nous nous retrouvons entourés de gens qui s’accordent a se moquer du monde et jusqu'à d’eux-mêmes quelquefois.
Je me retrouve parfois en eux et cependant le fait que tu sois semblable à eux me déçoit car lorsque je les invite c’est pour montrer un autre visage et toi serais-tu ainsi ? Où tu considères que le mépris est naturel à ton sens ? Cependant bien que je sois gênée par certaines attitudes de ta part je me vois semblable à toi en permanence. 
Car un autre genre d’entente entre nous qui défie le silence et la mésentente.
Grâce à ton pressentiment je me sens capable de capter tes réactions de sorte que chaque fois que je pense à toi, je me retrouve comblée de générosité et souhaitent partager mon bonheur avec tout le monde.

J’ai pleine confiance en toi et mon cœur réticent d’ordinaire se fond en larmes, c’est ainsi que je me réfère à ta bienveillance au moment du désespoir afin d exprimer le fond de mon âme noyée de tristesse bien que je paraisse joviale à l’envie.
Je me confie à toi pour te montrer la lourdeur de mon angoisse qui m écrase depuis l’aube de ma vie moi qui parait servie de deux ailes et d une auréole, je m’adresse à toi en t’appelant mon père et ma mère à la fois tout en craignant le poids lourd exercé par le Maître.
Je m’adresserai à toi comme à un parent bien que je considère que les parents ne soient pas toujours aimables.

Je m’adresserai à toi comme à un frère et un ami moi qui suis privée de frère et d’ami.

Je te montrerai ma faiblesse et le besoin qui me ronge pour acquérir plus de connaissance moi que tu considères douée d’un héroïsme sans pareil.
Je te montrerai combien j’ai besoin de tendresse et je pleure devant toi sans que tu ne le saches.

Je demanderai ton conseil lorsque je me trouverai dans l’embarras et si jamais je commets une erreur je m adresserai à toi soumise et tremblante attendant la punition et le châtiment.
Parfois il m’arrive de connaître consciemment une erreur pour provoquer ta colère afin de me soumettre à ta volonté.
J’essaierai de me corriger en suivant tes conseils et te rendant compte de ce que je fais afin que je reçoive de toi soit un signe de satisfaction ou de refus et me sentir alors comblée dans les deux ça.

Je te rendrai compte de ce qu on m’attribue comme d’erreur afin que tu sois pour moi le seul juge équitable.
Tout ce que le monde voit en moi comme qualités je me soumettrai à ton jugement afin de m’indiquer toujours le bon chemin. (La voie du progrès).
Je suis sûre que tu vas m’encourager et pardonner mes erreurs tout en méprisant ceux qui me souhaitent le mal. Car tu es capable de percevoir la vérité à travers mon âme.

De mon côté je tacherai de te défendre contre les envieux qui cherchent à te démolir car je ne vois en toi que le symbole de l’ homme parfait.
Je t’avoue tout cela car tu l ignores.
Dans ma solitude je t’imagine en train de me confier tes soucis autant que tes espoirs car tu es le symbole de l’humanisme idéal.

J’essaierai d’écouter dans ma solitude l’expression de tes soucis et espoirs car se retrouve en toi le sommaire de l’humanité entière.

Je serai à l’écoute de toutes les voix afin de retrouver la tienne et d’expliquer toutes les pensées afin que je glorifie tes opinions.
J’essaierai de retrouver à travers tous les moyens d’expression afin de m’assurer comme elles me paraissent fades devant le miroir à ta propre façon de t’expliquer.
J’essaierai d’imiter ton sourire.

En ta présence je reviens a moi-même pour mieux penser à toi et durant ton absence je m’abstrais aux autres pour ne penser qu’à toi.

Je t’imaginerai malade afin de te guérir, malheureux pour te consoler, exilé pour que je sois pour toi une patrie et prisonnier pour te libérer et vainqueur pour que je me flatte de t’admirer et me confier à toi.
J’imaginerai mille milles fois ce qui pourrait t’égayer et susciter ta joie et ton angoisse et comment tu réagis contre la médiocrité avec beaucoup de noblesse et d’ardeur.

J’imaginerai mille milles fois que tu sois capable d’être sévère ou d’être tendre afin que je sache à quel point tu serais capable d’aimer.
Du fin fond de mon âme le remerciement transcende envers toi comme l’encens sacré pour m’avoir inspirée ce que d’autres n’ont jamais été capables. Sais-tu cela toi qui l’ignores ?

Tu te rends tu compte de cela ? Es-tu conscient de cela? Toi tu l’ignores? Sais-tu cela? Moi je voudrais que tu ne saches pas.