Charles Corm

Version française du texte - Poète Charles Corm

Version francaise du texte

Charles Corm (Toile de J.P. Coury)

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Charles Corm, né à Beyrouth le 4 Mars 1894, est le fils du premier peintre libanais de renom, Daoud Corm, et a été toute sa vie passionné pour les arts et les lettres.

Tout jeune homme, en 1919, il fonde et dirige La Revue Phénicienne, la première publication de langue française, tribune politico culturelle de la scène libanaise de l’époque.

Dès la chute de l’Empire Ottoman, pour gagner son indépendance matérielle, à la suite d’un voyage en Amérique, il prend la représentation de Ford pour le Proche-Orient. Se déplaçant sans cesse entre ses agences disséminées dans la région, il vivra au plus près le drame arménien tout spécialement en Cilicie et dans le Sandjak: non seulement il rencontra les rescapés du Génocide, mais il essaiera de son mieux de les assister dans leur malheur.

A partir de 1934, il se consacre pleinement à la littérature et publie alors La montagne inspirée, une ode à son pays et son œuvre la plus connue, il exalta alors le patriotisme libanais et anima tout le mouvement littéraire et artistique de son pays. Parallèlement, et depuis 1928, il écrit La terre assassinée ou les Ciliciennes, une pièce de théâtre relatant le tragique exode arménien, jamais publiée jusqu'à maintenant. Il publia entre autres: L’Enfant de la Montagne (1938), l’Art phénicien (1938) et Le Mystère de l’Amour (1948)… il écrivit encore La Symphonie de la Lumière et Pour une vue de l’ineffable, traitant des peintres du Liban, ainsi que La Vie musicale, impressions critiques (1949). Il a collaboré à de nombreuses revues françaises, libanaises et égyptiennes, et a fondé en 1935 Les Amitiés libanaises, (qu’il dirigea depuis cette année-là), cercle créé pour la coopération des lettres, des arts et des sciences, dont l’activité brille surtout par un éclectisme des plus intelligents.

En 1938, il monte en grande partie à ses frais le premier pavillon du Liban à l’Exposition Universelle de New York, un spectaculaire panorama du patrimoine national, alors que le pays n’était censé disposer à l’époque que d’un stand dans le pavillon des colonies françaises…

Il contribuera également à la fondation de la Bibliothèque Nationale ainsi que du Musée National de Beyrouth, mais ne cessera d’écrire, surtout de la poésie, jusqu'à la fin de sa vie en 1963. Son message à ses compatriotes a toujours été humaniste et universel, jamais sectaire.

Nationaliste fervent et grand ami de la France, homme de pensée et d’action, il suit en poésie le mouvement romantico-symboliste, qu’il cultive avec élégance et talent. Plusieurs de ses poèmes peuvent êtres comptés parmi les plus représentatifs de la littérature libanaise de langue française.

Pour Charles Corm, l’histoire et les racines d’un peuple non seulement forgent son identité, mais surtout lui permettent de survivre: s’il remet ses aïeux phéniciens a l’honneur, c’est parce qu’avant de devenir chrétiens ou musulmans, ils n’étaient qu’un même peuple uni dans une même gloire…

Extraits du Livre : 6000 Ans de Génie Pacifique au Service de l’Humanité, Charles Corm, Editions de la revue phénicienne, Conférence donnée au Cénacle Libanais à l’occasion de l’Assemblée Générale de l’Unesco Beyrouth, le 7 Juin 1949.

La Première Maison en Pierre de Taille a la Surface du Globe

En 1936, deux savants archéologues français, M. et Mme Dunand, venaient de terminer une fouille exhaustive dans un coin de notre antique Byblos. Ils y découvraient, sous les dernières couches où se superposent les cendres de vingt civilisations successives, les assises de quelques constructions à même le sol vierge. En les reconstituant, ils eurent la surprise de trouver que c’étaient les plus vieilles habitations en pierre de taille qui soient connues à la surface du globe. etc

Astronomie : l’Etoile Polaire et la Boussole

Par une belle nuit de veille fortunée, aux temps les plus lointains de la vie humaine à la surface du globe, il semble q’elle a dû naître, cette civilisation, de la rencontre et de la conjonction, entre le ciel et le Liban, d’un regard attentif et du secret d’un astre. Il semble qu’elle soit née de la découverte, par un Libanais, de l’Etoile Polaire.

Appelée par les Grecs La Phénicienne, et dénommée ainsi, après eux, par l’univers entier, cette Polaire est la seule étoile fixe, dans tout le ciel mouvant, pour indiquer le Nord. Sans sa lumière fidèle, aucune navigation plus au moins sûre n’aurait été possible aux temps jadis. Depuis sa découverte, et jusqu'à ce que la Boussole soit venue par la suite au secours du voyageur, toutes les flottes de tous les temps et en tous lieux s’y sont guidées.

L’étoile des hommes qui commençaient à conquérir le globe, c’était, depuis l’antiquité jusqu’au seuil de nos temps, la Phénicienne…

Le Périple d’Ophir et la Fortune de Salomon

Hiram, roi de Tyr et ami de son père David, lui avait envoyé sur sa demande ses marins qui entendaient fort bien la navigation, car Salomon n’avait pas de flotte que l’on sache. Et étant allés à Ophir, ils y prirent quatre cents talents d’or qu’ils apportèrent au roi Salomon. Quatre cents talents d’or, cela fait environ quatre milliards cinq cents millions de francs d’aujourd’hui, avant la dévaluation, pour le bénéfice d’un seul voyage. etc…

Ce même roi, Hiram de Tyr, envoie encore à Salomon son architecte Hiram-Aviv, et des équipes d’ouvriers spécialisés dans tous les arts et les métiers, qui font tant et si bien que le Temple et le Palais qu’ils lui construisent sont réputés pour être des merveilles incomparables et qu’ils font courir à Jérusalem tous les touristes de l’Antiquités, jusqu'à cette curieuses Reine de Saba, qui s’éblouit de leur splendeur au point que Gérard de Nerval a pu supposer dans l’un des ses chefs-d’œuvre, qu’elle devint plus amoureuse de l’architecte Hiram-Aviv que de son royal client ! Entre autres prodiges surprenants, notre architecte Hiram-Aviv (dont le génie du reste a inspiré un autre chef-d’œuvre: L’Eupalinos de Valéry) avait édifié, dans la cour du temple, une vasque colossale, en bronze d’une seule coulée, portée sur la pointe des cornes de 12 taureaux de bronze grandeur nature, et disposés en cercle sous sa cuvette; ce qui parait vraiment, irréalisable aux plus habiles fondeurs d’aujourd’hui. etc...

Les Phéniciens et la Découverte de l’Amérique etc...

Les Phéniciens au Brésil et en Uruguay

La presse internationale annonçait en 1929 que le savant brésilien Professeur Ludovico Ciunhanej, dans une conférence donnée à l’Académie d’Histoire et de Géographie de Sao Paulo, a démontré par de multiples preuves tirées des inscriptions, de l’architecture et de l’étymologie, que les Phéniciens sont allés au Brésil à l’époque de la Guerre de Troie, plus de 1000 ans avant J.C. Les preuves matérielles sur lesquelles le célèbre historien s’est appuyé peuvent se résumer comme suit :

Inscriptions :

La plus importante consiste en un texte gravé sur une stèle découverte dans un banc de sable du fleuve Serido, province de Rio Grande do Norte. Elle fut soumise, au temps du gouvernement de l’Empereur Pedro II, à plusieurs archéologues, ainsi qu’à Ernest Renan qui venait de publier sa fameuse Mission en Phénicie. Renan confirma qu’elle remontait à 800 ans avant le Christ et en donna la traduction suivante : Je suis arrivé avec mes camarades et 30 ouvriers, après un long voyage maritime plein de dangers, en un port nouveau, avec les quatre navires qui nous restaient. Après quelques jours de marche dans l’intérieur des terres, nous sommes arrivés à cette montagne où nous avons trouvé de nombreuses mines. Nous avons travaillé ici six (ou dix) ans et avons extrait de ces mines de l’or, du cuivre et beaucoup de pierres précieuses. Signé: Alkhton, commandant et président ; Nada, adjoint et secrétaire. etc...

La Résistance de Tyr

Si dans la bousculade des peuples, où nous avons toujours été malmenés, nos gens ont souvent manifesté moins de mordant et moins d’attaque que d’esprit de résistance, ils ont pourtant marqué leur résistance d’un caractère particulier de grandeur et de noblesse.

Alexandre le Grand traverse le monde comme un bolide, sans qu’aucune force ait pu l’arrêter in instant, depuis la Macédoine jusqu'à l’Indoustan. Et pourtant, malgré sa fulgurante impatience, il doit piétiner, plus de sept mois durant, devant la résistance de Tyr, qui préféra périr plutôt que de lui céder sur une question de principe à laquelle elle attachait sa dignité et tout le prix de sa vie. Cette même Tyr, deux siècles plus tôt, avait déjà résisté 13 ans au plus grand potentat de l’époque : Nabuchodonosor, qui venait d’écraser l’Egypte et de pulvériser la Palestine, traînant après lui tout Israël en esclavage à Babylone. Trente ans après Alexandre, elle résistera encore à son successeur Antigone pendant plus de 13 mois.

Cette longue résistance, dit un historien français, prouve assez que Tyr, ruinée par Alexandre, n’avait pas tardé à acquérir une importance propre à exciter l’envie des successeurs du conquérant. Elle avait pourtant payé fort cher l’honneur qu’elle avait sauvé: Arrien affirme que le nombre des assiégés tués lors de la prise de la ville par Alexandre fut de 8.000, et que 30.000 furent plongés dans l’esclavage. Diodonne dit que 7.000 périrent les armes à la main et que 2.000 adolescents furent mis en croix tout le long du rivage, après le carnage. Noble cité, héroïque et martyre ! Justin déclare qu’elle fut prise par trahison et Polyen donne des preuves que ce ne fut que par surprise qu’Alexandre s’en rendit maître. etc...

Courage et Grandeur d’Ame d’Annibal

Il fallait bien aussi quelque courage à Annibal pour traverser en plein hiver, avec ses armées, ses éléphants et son ravitaillement, les neiges inexplorées des Alpes. Il lui en fallait bien plus encore pour que, coupé par toute la mer de sa capitale Carthage, et sans plus jamais pouvoir renouveler ses effectifs ni ses approvisionnements, il ait pu se pavaner en triomphateur, pendant une dizaine d’années à travers toute l’Italie, volant de victoire en victoire, et battant tous les généraux, jusqu'à ce qu’il eut complètement épuisé ses propres ressources.

Quant à la noblesse insigne qui doublait sans cesse le courage de cet homme, dont le génie faisait rêver d’admiration Napoléon à Sainte-Hélène, citons seulement cet épisode où, ayant écrasé Marcellus, le plus grand des généraux romains, il fit faire à la dépouille de son ennemi les plus glorieuses funérailles, faisant porter par l’élite de ses troupes, à travers tous ses camps, le corps de Marcellus, couvert de lauriers et embaumé d’honneurs. Il ne faisait pas étrangler ses ennemis au bout d’une corde parce qu’il les avait battus !... etc

Agriculture, Viticulture, Conserves

La viticulture passe pour avoir été inventée par les Tyriens, assure Achille Tot, L’art de saler les poissons et la fabrication des conserves des fruits de mer étaient connus et pratiqués par eux bien avant le Hollandais auquel Charles-Quint fit élever une statue, affirme un autre auteur. ...

Verrerie

L’industrie phénicienne du verre n’exigeait pas moins de compétence et de rigueur scientifique.
Pline raconte qu’un navire de marchands de nitre, ayant relâché sur la côte entre Sidon et Tyr, les marins utilisèrent des morceaux de ce nitre pour abriter le feu de leur repas, et que, par l’action du feu, la fusion de ce sel mêlé au sable du rivage, avait donne des coulées liquides transparentes qui furent l’origine du verre. Selon Strabon, qui confirme Tacite, le sable qui forme les dunes littorales entre Tyr et Acca ne devenait fusible qu’après avoir été transporté à Sidon. Ce qui veut dire : après avoir été traité dans les laboratoires de l’industrie sidonienne. ...

Physique Nucléaire

Cela prouve qu’en matière de Physique-Chimie, s’il faut en croire Posidonius, ils étaient si savants qu’on a la stupéfaction d’apprendre de lui que notre Moscus de Sidon avait déjà inventé la Théorie Atomique et analysé la structure nucléaire, avant la Guerre de Troie, c'est-à-dire à plus de 1200 ans avant Jesus-Christ. La théorie atomique ! Décidément, il ne faut pas s’étonner que tant de nos grands hommes continuent à sortir de Saida ! Mais à ce propos, est-ce que nous ne devrions pas réclamer une royalty, au moins morale, pour l’usage que l’industrie américaine fait à présent de la découverte de notre Moscus? Est-ce que nous ne devrions pas, en vertu de ce droit, exiger que la découverte de notre antique compatriote ne soit plus exploitée qu’à des fins pacifiques et humanitaires ?... Mais revenons à de plus sages réalités. ...

Sciences Médicales

Quelque stupéfiant que cela puisse paraître, il est incontestable, d’après de nombreux squelettes phéniciens qui le prouvent, que nos chirurgiens de cette haute époque pratiquaient la trépanation de la boîte crânienne, que la science moderne n’a osé aborder que tout récemment. Rien que dans le domaine de la chirurgie dentaire, on est surpris de constater, par exemple, dans les mâchoires de beaucoup de crânes phéniciens des dents plombées en or, des sutures en filigrane et des râteliers si ingénieusement travaillés qu’ils défient les plus grands perfectionnements de l’art moderne. ...

Droit et Jurisprudence

Aristote nous instruit que la Constitution des Phéniciens était si parfaite qu’on n’éprouva jamais le besoin d’en changer un seul article pendant près de 8 siècles. Peut-on en dire autant des meilleures institutions politiques de notre temps? Or, cette constitution, dit un historien expert en la matière, était démocratique; c’était le gouvernement du pays par la nation souveraine. Cela résulte clairement des textes bien interprétés d’Aristote, de Polybe, de Diodore, de Tite-Live et de Justin. ...

Notre Petite Pierre dans l’Edifice du Génie Humain etc...

Sur les 48 colonnes du péristyle du grand temple, les 6 dernières qui restent debout à leur premier emplacement ont, en plus de leurs socles respectifs, des tambours de 19 mètres de haut, qui supportent a leur tour des chapiteaux de 3 mètres de haut, et une architrave de 5 autres mètres, soit un total de 27 mètres de hauteur, sans compter le socle de la colonne qui en a plus de 2. Voilà donc 29 mètres de hauteur de l’ensemble de chaque colonne, par dessus d’autres dispositifs et par dessus les 20 mètres de hauteur de la base du temple.

La grande pierre équarrie, qu’on appelle la femme enceinte et qu’on voit encore dans une carrière abandonnée à la porte de Baalbeck, mesure 21 mètres 50 cm. de long, sur 4 mètres de haut et 5 mètres d’épaisseur. Elle forme in bloc net de toute aspérité, qui totalise 433 mètres cubes, et ne pese pas moins, a elle seule, de 1.000 tonnes. Il faudrait, selon les calculs de l’ingénieur de Saussaies, l’effort de plus de 40.000 homes pour la bouger!